vendredi , 29 mars 2024
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Gabon: L’illégale nomination d’Issoze Ngondet à la Médiature de la République

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L’ancien Chef du gouvernement s’est vu à la faveur d’un décret présidentiel pris en dehors de tout Conseil des ministres nommé au poste de Médiateur de la République.  Seulement, il semblerait que cette nomination porte en elle les germes d’une démarche irrégulière en violation flagrante des textes qui consacrent la forme et le fond d’une telle nomination.     

 

L’irrégularité de la nomination d’Emmanuel Franck Issoze Ngondet se donne à lire par La transgression flagrante de deux dispositions de l’ordonnance 23/PR/2010. Ces dispositions posent clairement les conditions de forme, puis de fond consacrant la régularité sur la procédure de nomination relative à la fonction précitée. L’une d’elle expose en outre, l’incompatibilité entre la fonction de Médiateur de la République et la possibilité d’exercer un mandat parlementaire.

 

En application des dispositions légales, l’article 6 de l’ordonnance 23/PR/2010, nous enseigne qu’« il ne peut être mis fin aux fonctions de médiateur de la République avant l’expiration de son mandat qu’en cas d’empêchement dûment constaté par la Cour constitutionnelle, saisie par le Président de la République. La cessation des fonctions est matérialisée par décret du Président de la République ».

Avant la récente nomination de l’ancien chef du gouvernement, la fonction de médiateur de la République était jusque là assurée par Laure Olga Gondjout.  Nommée le 16 janvier 2016, le mandat de l’ancienne ministre des affaires étrangères a expiré en janvier 2017. Tel que précisé au terme de l’article 5 de l’ordonnance 23/PR/2010, ledit mandat est de 3 ans renouvelable. Celui de Laure Olga Gondjout s’étant conformé aux exigences de la présente disposition , il se déduit qu’elle exerçait encore la même fonction sensée arriver à son terme en janvier 2020. Et ce d’autant plus qu’au terme de son mandat de 2017, aucun décret portant nomination d’un nouveau Médiateur de la République n’a été produit.

 

En sus, aucun élément matériel n’est venu étayer un cas d’empêchement dûment constaté par la Cour Constitutionnelle après saisine du Président de la République, du reste en convalescence au royaume chérifien. Or, l’établissement d’un décret, après constatation de l’empêchement par la Cour Constitutionnelle saisie par le Président de la République,  sont des exigences de formes qui concomitamment, consacrent la régularité de ladite nomination. Seulement, aucune preuve d’une saisine entraînant la constatation d’un empêchement de l’ancien médiateur de la République n’a été rendue publique. Constat fait, si le gouvernement ne peut justifier ni d’un empêchement ni d’une saisine du chef de l’Etat, sous quel fondement juridique aurait donc pu intervenir une telle nomination?

 

S’agissant de l’incompatibilité, l’article 12 de la même ordonnance précise que  « sont incompatibles avec les fonctions de médiateur de la République… l’exercice d’un mandat parlementaire ou d’élu local ». Pourtant, au terme de la dernière élection jumelée locale et législative, Emmanuel Issoze a conquis le siège de député de Makokou, chef-lieu de la province de l’Ogooué-Ivindo. Ainsi donc, l’incompatibilité de la fonction de Médiateur de la République est corroborée par la lettre et l’esprit de l’article précitée. Laure Olga Gondjout dont le mandat expire en Janvier 2020 devait en principe continuer à exercer ses fonctions de Médiatrice de la République.

 

Au visa de ce procédé qui contrevient de façon flagrante aux prescriptions  de l’ordonnance 23/PR/ 2010, il est évident que le gouvernement ne saurait expliquer encore moins  justifier, la régularité des récents décrets pris dans l’exercice du pouvoir public.

 

En transgressant les textes, l’exécutif s’est lancé dans une démarche fort insidieuse en produisant des décrets dont il a corrompu  la forme et le fond par des procédés illicites qui n’ont pour effets que de faire courir le risque que ces décrets de nominations soient frappés de nullités pour vice de forme et de fond. Une nullité qui serait possible après saisine du Conseil d’Etat dans un recours pour excès de pouvoir  en interprétation et en appréciation de la légalité des actes.