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L’interdiction de la dot : la violation collective d’une proscription légale

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© D.R

Dans la conscience collective gabonaise, une union solennelle célébrée sans dépôt de dot n’aura aucune valeur aux yeux de la famille. Ce principe est même la condition sine qua non pour la tenue d’un mariage civil.

Cette pratique notoirement établie dans l’ensemble des coutumes gabonaises est au demeurant illégale. En effet, aux termes de l’article 1er de la loi n°20/63 portant interdiction de la dot :

« Est interdite la pratique connue en droit coutumier sous le nom de « dot » qui consiste en la remise à l’occasion du mariage, par le futur conjoint à la famille de la futur épouse, de somme d’argent ou objet de valeur »

La loi nous dit-on est l’expression de la volonté générale mais s’agissant de celle portant interdiction de la dot, il faut reconnaitre que depuis son rentrée en vigueur, le 1er juin 1963, elle fait face à une réalité sociétale : la violation collective  d’une proscription légale. D’aucuns diront qu’en l’espèce, la réalité tord le cou à la légalité et cela malgré les peines d’emprisonnement et l’amende encourues.

L’article 3 de la loi susmentionnée dispose que : « sera puni d’un emprisonnement de trois mois à un an et d’une peine d’amende de 36 000 à 360 000 Francs ou à l’une de ces deux peines seulement, quiconque enfreindra les dispositions de la présente loi soit en exigeant ou acceptant, soit en remettant ou en promettant des présents en argent ou en nature à titre de dot (…). Sont assimilés aux dons en nature les prestations de services (…)».

La proscription s’étant aussi bien à l’exigeant, l’acceptant, le remettant et même le promettant, jusqu’à inclure parmi les dons, la prestation de services. Le législateur a pris le soin d’étendre autant que possible la répression d’une pratique qu’il voulait à la lecture de l’article 3 ci-dessus prohiber de la coutume gabonaise.

La loi n°20/63 sur l’interdiction de la dot est-elle tombée en désuétude faute de répression ?

Il faut se le dire, la volonté générale, ni en 1963 année de promulgation de ladite loi, ni en 2015 n’est favorable à son application.

Au Gabon, le poids de la coutume fait toujours sa loi, au point de s’imposer sur les réformes fussent-elles opportunes. Dans le cadre de la célébration du mariage, les festivités coutumières, précèdent dans la plupart des cas le passage devant l’officier de l’état civil et ne le succède que de façon exceptionnelle.

La dot bien qu’interdite conditionne l’alliance matrimoniale et la cérémonie de pré-dot – les pressentions interfamiliales – marquent le début officiel du processus de mariage, plusieurs familles y accordent une considération sans précédent.

Cette réalité sociologique devrait emmener la Chancellerie à abroger de l’ordonnancement juridique cette loi dont la violation des dispositions sont légion aux quatre coins du Gabon et légiférer dans le sens qui permettrait la cessation de pratiques diverses et variées qui ont fait perdre de toute sa substance le caractère coutumier du mariage, symbole de l’identité nationale.

Ecrit par :
Harold Leckat

Juriste, fondateur de Que Dit La Loi

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